Focus sur… l’homéopathie


Blog / mercredi, avril 8th, 2015

J’ai envie depuis quelques temps de vous présenter des thérapies plus ou moins connues qui me semblent être complémentaires de l’ostéopathie.
De mon point de vue, une prise en charge d’un patient est d’autant plus efficace quand plusieurs angles sont abordés. Chacun peut être amené à aller voir différents thérapeutes, médecin, sage-femme, kiné, mais aussi acupuncteur, sophrologue, psychologue, etc…
L’homéopathie y occupe une place à part. Malgré son immense succès (qui n’a jamais mis 3 granules sous la langue?), et le fait qu’elle soit pratiquée par des médecins, on entend tout et son contraire.

J’ai la chance d’avoir une mère homéopathe, qui exerce depuis une trentaine d’années. Je me suis permise de lui poser quelques questions sur l’homéopathie ainsi que sur sa pratique.

Sophie Robinne est médecin généraliste homéopathe uniciste à Paris. Elle est également formatrice à l’INHF Paris1, institut de formation en homéopathie uniciste.

 

Peux-tu nous expliquer les grands principes de l’homéopathie ?

L’homéopathie s’appuie sur trois piliers fondamentaux :

– La loi de la SIMILITUDE : en médecine classique ou « allopathie » on donne un médicament contre la maladie, la racine « allo » signifie « contre ». A l’inverse, la racine « homéo » signifie « semblable », l’homéopathie c’est la guérison par les semblables.

C’est Hahnemann qui a mis au point ce traitement, grâce à une découverte empirique à propos de la quinine, traitement du paludisme. Il s’est aperçu que ce médicament donné à des sujets sains provoquait le même type de fièvre que le paludisme. Il a découvert que l’on pouvait généraliser cette découverte, a donc expérimenté de nombreux remèdes chez des sujets « sains », en donnant à des sujets malades présentant certains symptômes les remèdes qui donnaient les mêmes symptômes chez des sujets sains.

– une conception GLOBALE de la maladie : quand l’organisme est malade ce n’est pas juste un organe qui va mal. On ne traite pas une laryngite, mais plutôt la personne qui a une laryngite, en tenant compte des autres symptômes, fatigue, changement de comportement, etc…

– une médecine PERSONNALISÉE : selon que l’ angine est localisée à gauche , à droite, ou des 2 côtés, selon que la fièvre est élevée ou non, associée à de la soif ou non, améliorée par les boissons chaudes ou par de la glace, les remèdes indiqués sont différents.

Hahnemann, fondateur de l'homéopathie
Samuel Christian Hahnemann (1755–1843), fondateur de l’homéopathie

 

Je sais que tu souhaites revenir sur les idées fausses qui circulent sur l’homéopathie. Lesquelles ?

Effectivement, il  y a un certain nombre d’idées faussement répandues qu’on entend souvent :

  • L’homéopathie est une médecine à base de plantes.
    C’est FAUX ! Une partie des remèdes sont à base de plantes, mais on utilise aussi des remèdes animaux (de la coquille d’huître par exemple, des venins…), ainsi que des minéraux (sels, pierres, cristaux).
  • Ça ne peut pas faire de mal.
    C’est FAUX ! L’homéopathie peut traiter très bien et très efficacement, mais à l’inverse un remède mal donné peut provoquer une aggravation de la maladie.
  • C’est une médecine lente.
    C’est FAUX ! Tout l’art de cette médecine étant de trouver le bon remède, quand on trouve un remède efficace, il peut agir très vite, en quelques minutes.
    La cinétique de la guérison suit la cinétique d’apparition des symptômes. Plus la maladie s’est installée rapidement, plus elle va disparaître rapidement.

 

Pour trouver le bon remède, il semble évident que nous avons besoin de l’aide d’un homéopathe compétent. Pourtant nous avons tous déjà utilisé de l’homéopathie en automédication, de l’arnica pour les bleus chez les enfants entre autre. Y-a-t’il des remèdes qui ne diffèrent pas d’une personne à une autre?

Les seules recettes sont des recettes de traumatologie. Une personne qui fait une chute, quel que soit son « terrain », va avoir une contusion, un « bleu », qui sera amélioré par arnica .

De même quand on se pince un doigt, quand on tombe sur la tête, quand on se brûle, on va retrouver les mêmes symptômes chez tout le monde, on peut donc appliquer ces fameuses recettes .

 

D’accord. Alors dans tous les livres qui existent sur l’homéopathie pour un usage familial, y en a-t’il un que tu conseilles à ce sujet ?

Un ouvrage que j’affectionne particulièrement : « le trésor de l’homéopathie en cas de blessures et d’accidents »2, de Colette Peyrard.

J’aime également le livre du docteur Joly, « Homéo bébé »3. On y trouve pas que de la traumatologie mais il est quand même très bien fait.

 

 Y-a-t’il des cas où l’homéopathie fonctionne et d’autres où elle ne fonctionne pas ?

L’homéopathie utilise l’énergie qu’a la personne pour réagir. Donc le traitement est efficace lorsque l’organisme est capable de réagir. C’est-à-dire que dans les maladies à un stade avancé le traitement va être beaucoup moins efficace que pour une colopathie, une angine, un rhumatisme ou une maladie inflammatoire comme une recto-colite hémorragique.

 

Un autre sujet qui reste souvent incompris, ce sont les dilutions. Peux-tu nous expliquer le principe de la dilution ?

Pour préparer un remède, on broie la matière première qu’on conserve dans un mélange eau/alcool (pour une bonne conservation). Puis on va prendre une goutte de ce mélange qu’on met dans 99 gouttes de mélange eau/alcool, on obtient une dilution à 1CH (centésimale hannémanienne, du nom du fondateur de l’homéopathie Hanneman). En mettant une goutte de ce mélange 1CH dans 99 gouttes d’eau/alcool on obtient du 2CH et ainsi de suite.

En même temps qu’on dilue on dynamise, c’est-à-dire qu’on secoue le mélange un grand nombre de fois. On s’est aperçu de manière empirique que plus le remède était dynamisé plus l’effet de la dilution est amplifié.

On a remarqué, également par l’expérimentation, que plus la dilution est forte, plus le remède agit sur un ensemble de symptômes variés. Un médicament 30CH, donc plus dilué qu’un 5CH, aura un impact plus fort sur le niveau mental par exemple.

A noter qu’il existe un autre type de dilutions, les dilutions korsakoviennesexprimées en K.

Granules d'homéopathie
Granules d’homéopathie en tubes et en doses de dilutions différentes

 

Je sais que tu es homéopathe uniciste, il existe également des homéopathes pluralistes. Peux-tu nous expliquer rapidement la différence, et également ton parcours, ce qui t’as amené à exercer comme tu le fais actuellement ?

Etre uniciste c’est donner UN remède pour l’ensemble de la personne. On considère l’individu dans sa globalité. Par exemple pour une personne qui a un cors au pieds, un mal de ventre et de la migraine, on devrait pouvoir trouver un même remède pour soigner ces différents symptômes. .

La méthode pluraliste est plus récente, elle date du début du siècle. On s’est aperçu que certains remèdes pouvaient être complémentaires, on a donc commencé à les associer. D’où des ordonnances où on voit des remèdes différents le matin, le soir, le weekend… En sachant qu’un bon pluraliste va plutôt travailler avec 5 ou 6 remèdes maximum.

Dans mon parcours professionnel, j’ai été pluraliste au départ.  Ma première rencontre avec l’homéopathie date de l’année 1985. Tu avait des coliques du nourrisson impressionnantes, qui se sont calmées (et ne sont jamais revenues) en une heure, avec un remède donné selon les symptômes que tu présentais, grâce aux indications d’un ouvrage du Dr Vallette. J’ai donc décidé de m’intéresser de plus près à l’homéopathie. A cette époque il n’y avait pas encore d’école uniciste en France, j’ai donc commencé des études dans une école pluraliste.

Les patients étaient contents des résultats, moi un peu moins. D’abord parce que les patients prennent en continu des remèdes, ce qui peut induire une dépendance, mais aussi parce que je m’apercevais au fur et à mesure que lorsque je prescrivais pour une pathologie, parfois les patients présentaient de nouveaux symptômes, comme si la guérison n’était pas complète.

Je suis donc allée parfaire ma formation dans une école uniciste en Belgique5. J’y ai appris une méthode différente, avec entre autre l’aide de « répertoires », afin de trouver le remède le plus adapté.

 

Je sais que tu as enrichi ta formation tout au long de ta carrière, y compris grâce à des conférenciers internationaux. Y-a-t’il des pays où l’homéopathie occupe une place prépondérante dans la médecine locale ? 

En Inde il y a des hôpitaux et des cliniques qui soignent avec l’homéopathie, c’est une médecine très populaire là bas, avec des formateurs de haut niveau6. D’ailleurs un ministère du yoga, des médecines traditionnelles, de l’homéopathie et de l’ayurvéda a été créé en Inde cette année.

L’homéopathie est également très présente en Amérique du Sud.

 

 Pour finir, comment fait-on pour reconnaître un bon homéopathe ?

Un homéopathe a besoin de temps, écoute attentivement, pose de nombreuses questions avant de prescrire.

L’autre critère est bien sûr l’efficacité ! De mon point de vue, il faut quand même laisser la chance à l’homéopathe de bien vous connaître, parce que trouver le bon remède peut demander quelques tâtonnements. Par contre si en quelques séances vous avez l’impression que rien ne marche vous pouvez commencer à vous poser des questions.

 

Tu souhaites ajouter quelque chose pour conclure ?

Travailler avec l’homéopathie a participé à changer ma vision de la maladie et de la santé.

Si on se dit que la maladie est une désorganisation globale de l’organisme, la santé apparaît alors comme un état d’équilibre global, on ne raisonne plus organe par organe.

Une guérison n’est plus une simple disparition du symptôme gênant. Une angine traitée en allopathie sera considérée comme guérie après disparition du mal de gorge, même si la personne reste très fatiguée pendant deux semaines. En homéopathie, une amélioration de l’état de santé doit être efficace sur l’angine ET sur la fatigue.

Enfin, l’homéopathie consiste à aider l’organisme en lui fournissant un catalyseur pour qu’il retrouve son état d’équilibre. On ne se substitue pas à lui, comme on le fait par exemple avec un antibiotique . Attention, il ne s’agit pas de dire que l’on peut se passer d’antibiotiques tout le temps, ils peuvent être nécessaires si l’organisme se défend mal.

C’est surtout très marquant en pédiatrie, où des enfants qui étaient tout le temps malades le sont de moins en moins voir plus du tout, au fur et à mesure d’une prise en charge homéopathique avec des améliorations de plus en plus rapides à chaque fois.

 

Merci d’avoir répondu à ces quelques questions. J’espère que ces éclairages répondront à une partie des interrogations que certains peuvent avoir.

De mon point de vue d’ostéopathe je retrouve de nombreux points communs dans ces deux pratiques. Cette vision globale de la personne, l’individualité du traitement, et même le fait d’en faire le moins possible en tant que thérapeute, d’être un simple catalyseur de la capacité de guérison du patient.

L’intérêt de travailler conjointement est grand, l’homéopathe à travers la parole et un traitement interne, l’ostéopathe par le corps et la matière.

 

 

Notes :

1. INHF Paris, Institut National Homéopathique Français, http://www.inhfparis.com/

2. Homéo bébé du docteur Joly, chez Hachette.

3.Le trésor de l’homéopathie en cas de blessures et d’accidents, de Colette Peyrard

4. Page Wikipédia sur les dilutions homéopathiques, ici.

5. Centre liégeois d’homéopathie, http://www.clh-homeo.be/

6. Anne-Cécile Hoyez et Olivier Schmitz, « Les voies indiennes de l’homéopathie », Transcontinentales [En ligne], 5 | 2007, document 6, mis en ligne le 05 mai 2011, consulté le 28 mars 2015. Disponible ici.

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